Faire l’acquisition d’un molosse = voir les
conditions d’élevage du chiot
Forte est la pression médiatique qui pointe régulièrement du
doigt les conduites agressives de molosses sur les êtres
humains, pendant que l’on néglige d’ailleurs, de relater les
attaques qui impliquent d’autres races abusivement cataloguées
comme « gentilles ».
Raison donc, pour partir du bon pied et commencer une bonne
relation en choisissant de faire l’acquisition responsable d’un
petit molosse inscrit au livre des origines françaises (LOF)
pour une meilleure garantie de sa bonne santé et de son bon
équilibre psycho-comportemental.
Fixer son choix sur une race
Si
l’on n’a pas encore fixé son choix sur le molosse que l’on
envisage d’acquérir, la rencontre avec des éleveurs des
différentes races que l’on met en balance, permet de préciser
ses propres attentes et préférences, et de mieux les mettre en
adéquation avec la race à retenir.
Ces
professionnels dresseront chacun le portrait de la race qui les
passionne, et tout futur acquéreur devra retenir celle qui
regroupe les qualités et « défauts » de chien, qui pourront
correspondre à sa personnalité et son mode de vie familiale.
Sans rester uniquement centré sur l’aspect physique (certes
important), tous ces renseignements permettent de « fouiller »
dans les caractéristiques raciales, pour pointer ce qui peut
orienter le choix final. Attention cependant, que tout ce qui
concernera le caractère sera à entendre avec beaucoup de
réserve. Certains traits tempéramentaux annoncés comme
« distant » « dominant » « pot de colle » etc… dépendront
surtout du modèle relationnel que ses propriétaires instaureront
avec leur chien.
Il
vaudra mieux s’attarder sur les prédispositions et aptitudes au
travail d’une race (aptitudes qui toutefois ne se révèlent que
si les facteurs nécessaires à leur apparition sont réunis,
parfois par dressage), éléments qui finalement en disent long
sur un profil comportemental et relationnel de chien.
Le « bon » élevage
Tout au long de ces rencontres avec des éleveurs, et comme il y
a toujours du mieux et du moins bien (dans cette activité comme
dans d’autres) examinons ce que peuvent être les critères sur
lesquels s’appuyer pour trouver le « bon élevage ».
Les
conditions d'hygiène des lieux et l'état de santé des géniteurs
(entre autre, l'absence de tare génétique telle que la dysplasie
par exemple) sont évidemment à connaître parfaitement.
Tout cela est primordial mais n’est pas tout, car la stabilité
émotionnelle du chiot, est un critère de choix dont il faut
particulièrement s’informer. Car comment envisager de démarrer
une bonne relation et éducation d’un chiot, si celui-ci n’a pas
les acquis de base absolument nécessaires à une poursuite
harmonieuse de son développement.
Pour un chiot équilibré
Quelles sont aujourd’hui les attentes d’un acquéreur qui ne
souhaite pas se faire remarquer en promenant son molosse ?
Il
le veut évidemment sociable avec ses congénères et les humains
(enfants ou adultes) et que son possible fort tempérament
(courant chez les molosses !) ne se traduise pas par de
l'agressivité, mais un parfait équilibre pour s'adapter aux
situations de la vie de sa famille ou au travail auquel il le
destine.
Comment obtenir cet équilibre, à partir de quand ce profil se
façonne-t-il ?
L’inné et les acquis
C’est la richesse en stimulations de la vie du très jeune âge,
qui prépare un chiot équilibré et apte à poursuivre sans crainte
ni surexcitabilité excessives, l’apprentissage de la vie avec
ses futurs propriétaires.
Tout chiot est d’abord l’expression de son patrimoine génétique,
c’est évident. Cependant, cette « promesse » génétique ne se
réalisera pour donner un animal prêt à vivre en société, que si
toutes les conditions sont réunies pour favoriser son bon
développement physiologique, mais aussi psychique et
comportemental.
La
qualité du vécu prénatal influe déjà sur le comportement du
chiot qui naîtra, et le bien être ou au contraire le mal être
psychique de la génitrice, fera toute la différence.
Quand il n’est pas offert une gestation paisible et confortable
à une femelle, les chiots « baignent » dans la gamme des
émotions négatives des chocs et du stress vécus par leur mère.
C’est déjà une certaine sensibilité qui s’acquiert là, in utero.
Des conditions de vie paisibles sont donc à privilégier pour la
reproductrice, durant sa gestation et pour sa mise-bas.
Et après...
Liée ensuite au comportement exploratoire, la stabilité
émotionnelle du chiot continue de se forger essentiellement
entre sa 3è et sa 8è semaine, si sécurisé par la proximité de sa
mère et sa fratrie, il peut rencontrer un monde suffisamment
diversifié.
C’est durant cette période de forte attraction sociale, qu’un
univers varié et stimulant lui permet d’abord de découvrir et de
se familiariser avec des formes, des matières et des couleurs,
des sons et des odeurs. Il peut apprendre à aborder les objets,
à exercer sa motricité et devenir de plus en plus confiant et
assuré. Enrichit d’expériences multiples, le chiot est préparé à
avoir plus tard dans sa vie, des réactions pondérées devant
toute nouveauté.
Parallèlement, il doit apprendre à interagir avec les êtres
vivants (d’abord ses congénères) et doit donc absolument rester
avec sa mère et sa fratrie, minimum 2 mois (et jusqu’à 3 mois si
l’enrichissement du milieu de vie est maximal)
Les
interactions avec les siens lui permettent de structurer des
comportements sociaux et le préparent à une future vie
collective. L’apprentissage de la ritualisation des contacts
entre chiens se fait là, et les mécanismes de l’autocontrôle et
de l’inhibition de la morsure se mettent en place. Le
chiot apprend le contrôle et l’interruption de tout
comportement, mouvements, morsures, au cours des jeux de
combats. Privé de ces acquisitions précoces, un chiot risque de
devenir un animal «tornade» et mordilleur à l’excès que rien ne
sait arrêter, avec ses congénères et les humains.
Dans le même temps, de quotidiennes manipulations douces et
attentives du chiot par les éleveurs, habituent celui-ci à
considérer l’humain comme espèce amie. Les différents profils
masculins et féminins, adultes et enfants sont à lui faire
rencontrer, si possible en admettant un peu la fratrie dans
l’habitat. Familiarisé aux bruits et odeurs d’un intérieur
d’humains, à leurs gestuelles, voix et contacts, le chiot est
mieux armés pour la vie en famille et préparé à aborder tout
contexte nouveau sans stress majeur.
Une
familiarisation également précoce à d’autres espèces animales
(ex : les chats et rongeurs présents dans nombre de foyers)
garantit la bonne aisance du chiot à vivre plus tard près d’eux.
Récapitulatif
Une
grande partie du devenir du petit molosse se joue donc dans les
toutes premières semaines qui suivent sa naissance, car
son cerveau est toujours en plein développement. Une majorité de
neurones ne se trouveront mis en activité que par les
stimulations de son environnement, reçues de ses différents
organes sensoriels. Des contacts corporels, de la lumière, des
bruits, des odeurs, puis des interactions avec les congénères et
autres espèces humaine et animales, vont progressivement
sculpter et programmer richement ce cerveau.
Sans assez de stimuli extérieurs à lui-même, le chiot n’acquiert
pas de capacités motrices, tactiles, visuelles, auditives et
olfactives performantes. S’il n’y est pas exercé très tôt, il
n’acquiert pas non plus de bonnes capacités à connaître et
reconnaître les siens ou d’autres êtres vivants, ni à développer
des compétences sociales avec eux.
En conclusion
Le
chiot faisant l’acquisition de mécanismes adaptatifs à son
environnement en général par la richesse et la qualité des
expériences très précoces qu’il aura pu faire, on peut mesurer
que l’élevage en chenils et boxes isolés ne favorisera pas le
plein épanouissement sensoriel et émotionnel des chiots, qu’un
type d’élevage plus proximal peut offrir.
Le
choix des reproducteurs, la qualité de vie et de
mise bas de la reproductrice, ainsi que les conditions
d’enrichissement du milieu pour un développement précoce
optimal des chiots, sont donc tout un ensemble à prendre
en compte par le futur acquéreur, pour orienter son « bon
choix » d’élevage et y trouver le « bon chiot ».
Texte publié dans le magazine "Molosses News" n°51
Danièle Mirat - Caniconsultante |